LE CHAT DE GELUCK, ENFIN À L’ÉCRAN
Star internationale de la bande-dessinée et figure incontournable du paysage cartoonnesque européen, le célébrissime Chat de Philippe Geluck s’offre aujourd’hui au public sous une forme que nous ne lui connaissions pas : l’animation.
Le Chat animé est né !
J’ai créé Le Chat en mars 1983, dans le quotidien belge Le Soir. Il est très vite devenu la mascotte du journal. La sortie du premier album de ses aventures, chez Casterman en octobre 1986, a marqué le début d’une formidable relation éditoriale qui ne fait que s’amplifier depuis.
Le Chat semble toucher tous les publics, sans distinction d’âge, de catégorie sociale ou de niveau d’études. (Et l’auteur s’en réjouit.)
Très tôt dans la vie du Chat me sont arrivées des propositions de l’animer pour la télévision. Si chacune d’entre elles était fondée, aucune ne m’a réellement séduit. Plusieurs pilotes ont été réalisés depuis 1988, tous restés dans des tiroirs. Et pourtant, j’ai vu tout passer : animation classique, flash, pâte à modeler, 3D et même un acteur déguisé en Chat. Chaque projet avait son charme et cependant je ne me suis jamais résolu à valider l’un d’entre eux. J’avais trop le sentiment que des intrus s’immisçaient dans mon jardin secret.
Ces différentes approches m’ont conforté dans une résolution : si Le Chat devait un jour se mettre à vivre sur écran, cela devrait résulter d’un travail et d’un investissement personnels. Je ne pouvais imaginer lancer un tel projet que si je mettais moi-même les mains dans le moteur. Je devais donc trouver et dégager du temps.
LA RENCONTRE
Autre défi de taille : il me fallait absolument rencontrer un créateur en animation dont l’univers puisse entrer en complicité avec le mien.
En 2008, ces deux paramètres ont été réunis. D’une part, j’ai décidé d’arrêter mes collaborations aux émissions de radio et de télé françaises auxquelles je participais depuis 1996, d’autre part, j’ai eu la chance de rencontrer Jean Goovaerts (animateur et réalisateur) avec qui j’ai travaillé pendant deux ans à la réalisation des quelques pilotes fondateurs de la série La Minute du Chat.
L’esthétique de ses décors et éclairages, son sens du rythme, du bruitage et de l’illustration sonore me réjouissent. Nos échanges artistiques nous ont permis d’inventer un langage propre à cette série. Là où le spectateur s’attend à voir Le Chat sortir de ses cases pour proférer des sentences, vérités ou contrevérités dont il a le secret, il verra débouler un aréopage totalement déjanté, cependant fidèle à mon univers humoristique, mais plastiquement inattendu. Bien sûr, Le Chat reste la vedette de la série, mais il y est entouré de moult guest stars.
LA VOIX DU CHAT
Le Chat bouge bien, ça nous l’avons su dès les premiers essais. Aujourd’hui, Le Chat a une voix, depuis que Jean-Yves Lafesse a accepté de lui prêter la sienne.
La principale problématique qui se posait à nous était la suivante : un Chat très statique peut-il être le héros d’une série animée ? Le défi est de taille. Comment passer de cette immobilité légendaire (qui est l’une des caractéristiques du héros) au mouvement indispensable en animation. Un journaliste a un jour décrit Le Chat comme du « Tex Avery immobile ». Jolie formule sur le papier, mais quid du passage à l’écran ?
Nous avons trouvé la solution : puisque Le Chat ne s’agite pas beaucoup, nous ferons bouger tout ce qui l’entoure et de plusieurs façons. Nous n’allons pas nous cantonner à une seule technique d’animation, mais au contraire les multiplier : animation classique, croquis animés, 2D, 3D, papiers et photos découpés, stop motion, dessins filmés, marionnettes, images d’archives bidouillées, gravures détournées ou autres délires graphiques dont je me régale depuis plus de trente ans...
LA MINUTE DU CHAT / LA SEMAINE DU CHAT
Dans ce projet d’animation, il faut distinguer La Minute de La Semaine du Chat. Dans la première, il s’agit d’épisodes quotidiens de 48 secondes qui comportent entre une et cinq séquences (ou histoires ou gags) réalisées dans des techniques différentes. L’effet est imparable car au rythme de chaque partie vient s’ajouter celui donné par le changement de traitement.
La Semaine du Chat, quant à elle, dure 6 minutes et paraîtra le week-end. Elle reprendra tous les épisodes diffusés la semaine qui précède, auxquels s’ajouteront des bonus tels que des sketches tournés avec acteurs (dont moi-même) et des interventions animées exclusives.
La musique originale est composée par Antoine Chance et interprétée par le Kočany Orkestar (fanfare macédonienne).
Au long de ces 35 années d’activité, j’ai continuellement alterné le travail en équipe (radio, télé, théâtre) et la création en solitaire (dessin et écriture). Ce qui me réjouit dans le projet actuel est qu’il me permet de dessiner, d’imaginer et d’écrire en compagnie d’une escouade de créateurs jeunes, talentueux et motivés. L’enthousiasme est à son comble. Pour la première fois de ma vie, j’écrirai des histoires du Chat avec d’autres scénaristes, histoires que nous mettrons en mouvement avec plusieurs cellules qui regrouperont au final une soixantaine de personnes. Créer du rire et de l’emploi, quel beau projet de vie, au fond.
Philippe Geluck, août 2011